Comparatif Crozes 2010 et Cornas 2009 de Maxime Graillot

Deux vins très différents mais excellents.

Robe plus soutenue pour le Cornas et surtout avec un bel éclat limpide alors que le Crozes apparait légèrement trouble.

Le Cornas est plus profond, presque animal-une pointe truffée, terrien, plus rentré, moins évident, alors que le Crozes est divinement aérien, floral, séduisant, immédiat. L'élevage est très élégant sur Cornas, magnifiquement intégré même si cela reste assez cèdre puis cacao, réglisse (à H+15, le nez semble moins accessible de manière générale: fruit et lardé).

Quelques suggestions de plantes qui pourraient plus tard aller vers l'eucalyptus. Le lardé est moins évident que sur Crozes, peut-être est-ce dû à l'absence de sucrosité florale pour le souligner (il y a quand même une douceur mûre très jolie). Belle expression de fruits noirs-rouges dans les premières heures suivant l'ouverture (moins le lendemain donc ? ). C'est plus "austère" tout en restant gourmand. Très syrah mais réveillant des souvenirs bordelais ou languedocien (Roc de Cambes, Tertre Roteboeuf, Peyre Rose).

La bouche est large, puissante, fruitée (le pruneaux, un vague cassis, belle maturité avec pointe de douceur à peine) mais avec un fumé présent. Plus de matière, impression en tout cas. L'acidité est belle et équilibre quelque part l'alcool bien présent sans excès. Ce dernier assèche un peu en finale pour pinailler. Magnifique, j'adore ! Je nuance toutefois à H+24, le nez me fait découvrir quelques notes de caramel à la Montcalmès 2010 et la bouche m'écoeure un peu, mais je pense ne pas être bien disposé à boire du vin ce soir. C'est résolument un vin pour passer à table, contrairement au Crozes.

Le Crozes est un enchantement de rose-pivoine confite, tout en étant également sanguin et lardé-fumé. L'orange sanguine mêlée de fraise cuite poivrée est bien présente. Cela reste plus sobre qu'un domaine des Tours 2011, moins pompier-loukoum ! Il y a un côté ferreux-fruité-acidulé-lardé typique encore de la syrah. Très différent du Cornas.

Il m'a semblé percevoir un instant quelques herbes difficiles à cerner, que je ne situe pas vers l'eucalyptus, limitons-nous à herbes coupées. En comparaison, cela se rapprocherait du Guillamy 11 de La Tâche mais en plus frais, moins confit. La douceur du confit fruité-floral a plus de tenue et ne s'en va pas trop vers le sirop de cassis-hibiscus. La bouche est pleine, onctueuse, fraiche surtout. Très belle consistance fraiche, palpable, non portée par l'alcool. L'acidité parait plus prononcée. Il n'y a pas la puissance-rondeur du précédent, la longueur est plus linéaire, épurée mais a moins de réserves. La douceur-sucrosité très mesurée est similaire au Cornas. Présence d'une petite pointe de végétal très très discrète dans le fruit (ce que n'a pas du tout le Cornas) que j'apprécie mais qui peu sembler véhiculer de la dureté aussi.

Conclusion: Difficile de préférer l'un de l'autre, ils se complètent parfaitement ! Cornas est plus ample, charnu, un peu plus long mais peut-être encore trop sur l'élevage. Crozes a une sensualité plus colorée, fraiche mais peut-être un peu dure par moment. Nobody's perfect, et c'est bien ainsi ! Les deux vins sont délicieusement équilibrés et offrent une version de la gourmandise bien à eux ! Irrésistibles tous les deux.

TRES BIEN +

NB: Honnêtement, je ne peux affirmer que l'aération soit utile, même pour le Cornas. Ils tiennent bien 12 heures mais je trouve qu'à H+24, le déclin s'amorce (petite apparition d'acescence)